Juanita de Simone Gélin

Le livre :  Juanita de Simone Gélin. Paru le 6 février 2023 chez Caïrn – collection Du Noir Au Sud. 14€. (480 p.) ; 18 x 12 cm

4e de couv :

Été 2022, Léa, vingt-sept ans, DRH dans une compagnie d’assurance parisienne, est aux premières loges lorsqu’un macchabée vieux de cinquante ans est découvert dans une propriété du Cap ferret ayant appartenu à Toussaint Casanova, ancienne figure du grand banditisme bordelais de l’après-guerre.

Grâce au récit d’un ancien policier, Léa va découvrir l’incroyable ascension de Juanita, née en 1940 aux Capucins, quartier espagnol de Bordeaux, son parcours dans une société machiste (mais en pleine mutation, secouée par les mouvements contestataires de 68 et par l’émergence d’un élan féministe), dans le monde de la prostitution et de la contrebande de l’époque. La beauté de Juanita, son tempérament, son caractère entier, sa générosité, comme en témoignent ceux qui l’ont approchée, sa volonté de s’arracher à la pauvreté, de s’émanciper, sa rébellion contre l’ordre établi et la fatalité, son puissant goût de vivre, et sa quête éperdue de vérité, de bonheur, et d’amour en faisaient une personne fascinante qui ensorcelait tous ceux qui avaient la chance de croiser son chemin.

Pour Léa, troublée par les coïncidences et en proie à un étrange phénomène d’identification, la découverte du corps ouvre la porte à toutes les interrogations. Que s’est-il passé en 1969 ? Qu’est devenue Juanita et à qui appartiennent les ossements découverts sous la terrasse ?

 

L’auteur : Après une carrière dans l’enseignement, Simone Gélin se consacre à l’écriture de romans dont le cadre privilégié est Bordeaux et le bassin d’Arcachon, où elle vit et puise son inspiration.
Ses écrits ont reçu plusieurs récompenses : Prix de la nouvelle au salon du livre de Hossegor en 2012, et au Festival Paris Polar en 2016 ; Prix Augiéras en 2014 à Périgueux et prix du jury au salon de Saint‐Estèphe pour le roman Le Journal de Julia.
En 2017 elle obtient le Prix de l’Embouchure au festival international de littérature policière Toulouse Polars du Sud pour L’Affaire Jane de Boy.
En 2018 elle publie dans la collection Du Noir au Sud son cinquième roman, Sous les pavés la jungle. En 2020 elle publie dans la même collection Adieu Lola et la réédition poche du titre Le journal de Julia.

En 2021, son titre Adieu Lola est récompensé par le prix Jaune Corbeau lors du Festival Regards Noirs de Niort.

Elle signe en 2022 Des enfants au paradis.
Extraits :
«  Si les deux personnes chargées de son éducation – sa mère et l’instituteur – s’étaient montrées un peu plus responsables, Juanita aurait pu intégrer le lycée, elle aurait obtenu son bachot, serait peut-être entrée à l’École Normale, aurait épousé un instituteur, ils auraient eu un poste double, dans une petite école de campagne, lui les grands, elle les petits, ils auraient eu un logement de fonction au-dessus des salles de classe, ils auraient possédé une voiture, deux gosses, des vacances en camping, bref, le bonheur. »
« Ses deux expériences avec Miguel lui laissaient un souvenir glauque. Quant à Luis, elle consentait à lui faire plaisir, mais cela n’avait rien à voir, parce qu’il y avait entre eux des années de tendresse. Avec Luis, c’était un don de soi qu’ils s’accordaient l’un à l’autre.
Et la passion dans tout ça ? À dix-sept ans, elle doutait déjà de son existence. Une invention de romancier, peut-être. »
« Elle avait bien compris que certains ici ne gagnaient pas leur croûte de leur sueur. Et que ceux qui trinquaient ensemble, palabraient et riaient fort autour des tables, n’opéraient pas tous du même côté de la loi. Elle découvrait qu’ici les règles étaient différentes, les bons et les méchants pouvaient se côtoyer librement, se taper dans la main ou sur l’épaule pour conclure des accords et tordre le cou à la morale. Ce monde était bizarre. Dépourvu de scrupules. Et pétri de contradictions. Il fallait des codes pour s’y retrouver. Des codes qu’elle ne possédait pas. Pour le moment. »

 

La chronique jubilatoire de Dany

 Juanita de Simone Gélin

Il s’agit d’un véritable roman historique … non pas la grande histoire avec ses batailles ou sa prise de la Bastille, non une belle fresque qui nous mène de 1940 en Espagne à l’été 2022, sur le bassin d’Arcachon, juste sorti des incendies, en passant par le Kosovo. La trajectoire de vie de deux femmes aux destins étrangement ressemblants, tantôt à la troisième personne comme un récit journalistique quand nous découvrons les coulisses de la prostitution des années 50 à Bordeaux, tantôt à la première personne quand Léa nous propose une chronique journalière de son séjour au Cap-Ferret. Deux femmes qui souhaitent maîtriser leur vie, assumer leurs goûts, rester fidèles à leurs valeurs.

Il s’en est passé des choses aux Capus, quartier emblématique de la belle endormie, où les émigrés ont toujours trouvé refuge dans des habitats insalubres, en vivant d’expédients, ne devant leur tranquillité qu’à leurs accommodements avec la pègre locale et la police. La mafia était tranquille : elle avait rendu service pendant la guerre et aura encore à en rendre avec le SAC.

Comme dans ses précédents romans Simone Gélin s’est livrée à un travail de fourmi pour reconstituer l’ambiance et les faits de cet après-guerre glauque, dans un environnement rude, qui n’avait rien à envier aux bas-fonds marseillais. L’auteure a fait œuvre d’historienne en émaillant son texte de courtes références journalistiques de l’époque. Elle est aussi d’une précision redoutable lorsqu’elle parle du club de football des Girondins, de leur aura tout comme de celle des stars de l’époque, du strass et des paillettes mais aussi de l’alcool et de la drogue.

Deux destins de femmes qui nous touchent à 70 ans d’écart, où la domination n’a pas dit son dernier mot. Simone Gélin, une féministe assurément, qui ne juge pas et qui rend compte de la complexité des sentiments.

En prime, elle vous offre un final à couper le souffle, auquel je ne m’attendais pas et qui nous fait refermer ce roman à très gros suspense, avec le sourire.

Je remercie les éditions Caïrn pour leur confiance et l’auteur pour sa disponibilité.

Lu en version numérique

 

Autres Extraits :
« Il faut remonter à la guerre de 40 pour comprendre. Et même avant. À cette époque, de Marseille à Paris et à Bordeaux, en France, l’implication des Corses dans le milieu du grand banditisme était importante, pour ne pas parler de monopole, ou presque. Vous avez sans doute entendu parler des frères Guérini qui se sont rendus célèbres à Marseille. Avant la guerre, Barthélémy Guérini, dit Mémé, était venu se réfugier à Bordeaux, chez Titi, le père de Toussaint qui était déjà une figure du milieu bordelais de la prostitution et qui lui a enseigné le métier. Plus tard, Mémé Guérini a rejoint son frère sur la Côte d’Azur où il s’est imposé comme proxénète. Pendant la guerre, il s’est engagé dans la résistance, il fut l’un des dirigeants du réseau de Joseph le Fou, branche du réseau Brutus. »
« De toute façon, tout est provisoire, dans ce bas monde, alors… Et le meilleur dans l’amour, c’est le début. Après, il se dégrade vite. C’est déjà un miracle de posséder de si beaux souvenirs. »

4 réflexions sur “Juanita de Simone Gélin

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