L’île de Yule, Johana Gustawsson

Le livre : L’île de Yule, Johana Gustawsson. Paru le 18 janvier 2023 chez Calmann-Lévy dans la collection Calmann-Lévy Noir. 19€90.  (332 p.) ; 22 x 14 cm

4e de couv :

L’île de Yule

Le coeur battant, Emma Lindahl cogne à la porte du manoir dressé sur une petite île au large de Stockholm. Experte en art, elle doit procéder à l’inventaire des biens de la famille Gussman, quatrième plus grande fortune de Suède. L’île et son manoir ont une réputation sulfureuse depuis que, neuf ans plus tôt, une adolescente a été découverte pendue à un arbre du domaine, tuée dans des conditions affreuses. Son assassin n’a jamais été retrouvé.

Emma se rend vite compte que son travail va lui prendre des mois, seule dans ces immenses pièces où elle ne croise jamais personne, car les Gussman ont expressément refusé de la voir et lui imposent des horaires stricts. Bien qu’elle ne soit pas impressionnable, l’ambiance ici lui glace le sang.

C’est alors qu’une nouvelle jeune fille est découverte, morte, dans la mer gelée, et toute laisse pensé qu’elle a été victime du même tueur…

Un thriller aussi effrayant que captivant, enraciné dans les rites vikings et les sombres amours

L’auteure : Française d’origine catalane Johana Gustawsson est née à Marseille , le 7 juillet 1978. Elle a vécu à Paris puis à Londres et aujourd’hui  lle vit à Lidingö, en Suède avec ses fils et son mari. Diplômée de Sciences Politiques, Johana Gustawsson a été journaliste pour la télévision et la presse françaises. Elle s’est fait connaître en 2013 en coécrivant On se retrouvera.
Elle a publiéentre 2015 et 2020 trois romans mettant en scène les enquêtrices Emily Roy et Alexis Castells (« Block 46″, « Mör » et « Sång« ). Elle s’est fait un nom sur la scène du polar international en seulement quelques années. Sa série Roy & Castells a été cédée dans 23 pays et est en cours d’adaptation télévisuelle. Depuis sont parus deux autres polars chez Calmann Levy, Te tenir la main pendant que tout brûle et L’île de Yule

 

 

 

Extraits : 
« Une heure et vingt minutes plus tard, je me trouve de l’autre côté de la baie, sur l’île de Storholmen. Face à moi se dresse un sapin fier et majestueux, nappé de givre comme s’il avait été dessiné pour illustrer un conte de Noël.
Cette fois, la nuque que je regarde tangue entre les branches.
L’air glacé me brûle le gosier comme une gorgée de snaps.
J’extirpe avec peine mes bottes enlisées dans la neige compacte pour me rapprocher de la pendue. La corde a remonté ses cheveux blonds jusqu’au niveau des joues, dessinant deux touffes grotesques qui semblent jaillir de ses oreilles. Elle est accrochée à une branche basse, pratiquement contre le tronc du sapin, ses pieds dansent à trente centimètres du sol.
Je pose mon majeur et mon pouce sur son épaule. Le latex de mes gants adhère à sa peau gelée et, durant quelques secondes dilatées, je ne vois que la couleur parme de mes doigts qui détonne comme un détail de mauvais goût dans le paysage immaculé. Je tourne prudemment le corps vers moi, la corde crisse sur la branche.
Ses yeux sont grands ouverts.
Je ferme les miens un instant.
Elle est jeune. Bon Dieu qu’elle est jeune. Une enfant de… quatorze, quinze ans tout au plus. Elle porte autour du cou un lacet en cuir, caché sur sa nuque par la corde et l’amas de ses cheveux. Une paire de ciseaux ouverte y est attachée comme un pendentif démesuré ; une des pointes pique son sein nu, côté cœur. De larges coupures à l’intérieur de ses cuisses, au niveau de l’artère fémorale, ont laissé couler beaucoup de sang. Leur tracé est propre et net, d’une précision chirurgicale. »
« Storholmen impose le silence à une foule muette dont je fais partie. Une foule qui écoute ce silence comme un prélude au drame. »
« Je prends soudain conscience que, depuis mon arrivée, je n’ai rien entendu d’autre autour de moi que le son de nos bottes qui écrasent la neige et de nos combinaisons froissées. Une musique funeste jouée en sourdine. Personne ne parle. Personne n’ose parler. Cette île déclenche en moi une sensation glaçante : je me sens forcé d’étouffer les bruits de mon passage. Jusqu’à ceux de mes pensées. Comme si j’avançais en territoire ennemi, les doigts crispés sur la crosse de mon fusil. »

 

Le post-it de Ge

L’île de Yule, Johana Gustawsson

Me voilà pour une fois perplexe avec un titre de Johana Gustawson. En effet notre Française au patronyme suédois nous propose là un polar totalement scandinave. Bon il est vrai que notre autrice vit depuis quelques temps aux pays de vikings, aussi a-t-elle eu le temps de s’immerger dans leurs us et coutumes, leur rythme et leur façon de vivre.

Du coup, en lisant L’île de Yule, j’ai vraiment lu un polar nordique. Il y avait tout d’abord l’ambiance des lieux décrits, ou encore l’esthétique de la narration, la lenteur de l’intrigue. De plus  Johana a su aussi être attentive à l’intimité des personnages, à leur psychologie. Enfin pointe en toile de fonds l’évocation d’une critique sociale à peine voilée

Mais que raconte « L’île de Yule »

Experte en art, Emma Lindahl débarque en plein hiver sur l’île dans le village de de Storholmen sur une île suédoise reculée pour dresser l’inventaire de l’inestimable collection du manoir Gussman. La jeune femme est anxieuse car plusieurs année au paravent une mort violente inexpliquée a eu lieu sur l’île. Aussi lorsqu’un autre meurtre est commis et qu’un corps est retrouvé sous la glace, elle est amenée à collaborer avec l’inspecteur Karl Rosén, qui s’avère être le mari de la victime.

Vous l’aurez compris, j’ai aimé tout cela, la narration à plusieurs voix, Emma, Karl mais aussi celle de Viktoria Wallin, une domestique de la famille Gussman.

Un roman choral où chacun nous dévoile à tout de rôle et sur différentes époques son ressenti du lieu, cette île polaire mais aussi sur la famille Gusmann, son manoir lugubre et ses secrets. La mère et son fils dérangé. Et tout cela participe à nous plonger dans une atmosphère angoissante. Car en plus on y évoque les mythes scandinaves, le panthéon Viking, le royaume d’Asgard. En y parle de légendes macabres.

Et puis il y a ses deux homicides commis à neuf ans d’intervalle mais visiblement perpétré par le même criminel.

Il y a aussi l’histoire et le passé trouble de ce petit pays souvent en guerre avec un de ces grands voisins, l’imposante Russie et son envie irrépressible d’extension.

Et puis il y a la plume fluide de Johana qui nous raconte la suède d’aujourd’hui, la façon de vivre suédoise, le rythme de vie à la suédoise, la mentalité suédoise. Une écriture qui porte à la réflexion ici notre auteure nous parle de parentalité, de devoir vis-à-vis de nos enfants…de deuil aussi.

Et enfin il y a l’intrigue que l’on pourrait placer au second plan. Mais pas du tout ! Car une nouvelle fois, Johana nous concocte un scénario diabolique. Elle place savamment çà et là tout au long de son histoire les pièces maitresses du puzzle qu’il va nous falloir reconstruire pour comprendre l’entièreté de cette histoire. Elle sème des indices qu’il nous faut découvrir pour appréhender toute la complexité de ce récit au final incroyable.

Je ne vous en dit pas plus et vous laisse plonger, en apnée, vous êtes prévenues, dans cette énigmatique, effrayante et sensationnelle histoire suédoise et scandinave.  Et foi de porte flingue vous allez passer un super moment de lecture plein de de mystères et mythes et légendes et de rebondissements.

 

Autres extraits
« Malgré tout l’amour et le soin de leurs parents pour qu’ils ne manquent de rien, les enfants prennent parfois des chemins de traverse qui les conduisent droit dans le mur. « 
« Quelle que soit la bataille des sexes et des genres qu’on se livre, il y a des réalités indiscutables, scellées par la nature : la femme porte l’enfant et lui donne naissance, le choix de devenir mère l’aliène bien plus que l’autre parent. »
« L’amour continue d’exister dans le vide, comme dans tout deuil, mais il pèse dans chaque acte du quotidien dépeuplé de l’autre. La vie telle qu’on la tissée, cousue et raccommodée pendant des années d’existence partagée meurt elle aussi. Finalement, il ne reste que la moitié de tout. »

Lu dans le cadre de 5 défis littéraires

– Challenge Thriller et polar 2022- 2023 chez Sharon

– Challenges Les Dames en Noir 2023 chez Zofia

– Challenge : Auteurs des pays Scandinaves chez Céline

– Le Mois du Polarchez Sharon – Février/mars 2023 (N°16).

le tour du monde en 80 jours chez Bidib (6 Suède)

 

 

16 réflexions sur “L’île de Yule, Johana Gustawsson

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