La double chronique sur Collectif Polar
Une mamie Flingueuse et une Porte Flingue ont lu le même titre et elles vous offrent leurs différents avis.
Ge, ce matin, nous parlait de Oscar a Wagner a disparu,
cet après-midi c’est Dany qui nous donne son ressenti
Le livre : Oscar a Wagner a disparu de Jean-Christophe Portes. Paru le 1er mars 2023 chez Hugo Roman dans la collection Hugo Thriller. 19€95. (374 pages) ; 21 x 14 cm
4ème de couverture :
Une chasse à l’homme sous l’occupation.
Paris, 1942. Lorsque Mo les-Yeux-Bleus, truand notoire et proxénète, patron d’une des boîtes de nuit les plus réputées de Pigalle, rencontre par hasard Oscar Wagner, il n’a d’autre choix que de le tuer. Mais cette disparition semble inquiéter beaucoup de monde, dont les voyous de la Gestapo française.
Il apparaît rapidement que Wagner était au centre d’un jeu complexe entre services secrets allemands, Gestapo et même Intelligence Service. Il s’apprêtait à dévoiler un secret qui pourrait changer le cours de la guerre !
Quel est ce secret ? Et qui est vraiment Lizzie Van der Jagt, la mystérieuse secrétaire de feu Wagner ?
Bientôt, Mo le tueur devient la proie d’une terrible chasse à l’homme en pleine Occupation.
L’auteur : Né à Rueil-Malmaison en 1966, après des études à l’Ecole Nationale de Arts Décoratifs, Jean-Christophe Portes a été journaliste, et réalisé une trentaine de documentaires d’investigation, de société ou d’histoire pour la télévision.
Entamées en 2015, les enquêtes de Victor Dauterive mettent en scène un jeune officier de gendarmerie sous la Révolution. La série compte aujourd’hui six épisodes, L’affaire des corps sans tête, L’affaire de l’homme à l’escarpin (prix polar Saint-Maur en poche 2018), La disparue de Saint-Maur, L’espion des Tuileries, La trahison des Jacobins et L’assassin de septembre.
Minuit dans le jardin du manoir est son premier policier contemporain, publié aux éditions du Masque / JC Lattès en 2019. Un polar d’aventure, entre Agatha Christie et Indiana Jones qui est récompensé par le prestigieux prix 2020 du roman d’aventures.
Parallèlement, Jean-Christophe Portes est co-auteur avec Colette Brull-Ulmann d’un témoignage sur l’histoire méconnue de l’hôpital Rothschild pendant la 2ème guerre : Les enfants du dernier salut .
Les experts du crime propose une plongée inédite dans les pas des experts criminels de la gendarmerie, au sein de l’IRCGN.
Jean-Christophe Portes vit actuellement à Margency, une petite commune du Val d’Oise.
Extraits :
« Mon petit déjeuner avalé, je plaque mes cheveux bruns à la gomina, j’enfile un costard sur mesure à fines rayures grises, élégant mais nettement plus discret que cette espèce d’uniforme que beaucoup revêtent dès qu’ils palpent un peu : Borsalino, chemise en soie, diam’s et bagouses. Et c’est sans compter les tatouages, les « Fatalitas » sur les bras, les « robinet d’amour » au-dessus du chibre, le cou entouré de traits bleuâtres, « découper selon le pointillé ». Avec ça, les flics n’ont même pas besoin de consulter le sommier pour les retapisser.
Je n’ai jamais voulu leur ressembler. Ils ne pensent qu’à trouver de l’argent et à baiser. À vingt ans ils sont perdus, la plupart finissent raccourcis sur l’échafaud, ou ils crèvent au bagne, ou bien un concurrent les plante. Pour vivre heureux, vivons cachés, comme le cousin Antoine Guérini à Marseille, riche comme Crésus mais pingre comme un employé de mairie. »« ll se pourrait même que ceux qui s’en chargent soient Lafont et sa bande d’enfoirés. Parce qu’ils ont bien changé, ces derniers temps. Au début, ils se contentaient de racketter les Youpins ou de fournir en marchandise les bureaux d’achat boches. Mais leurs patrons frisés en veulent plus : ils ont collé un adjoint à Lafont, l’ancien flic marron Bonny, une célébrité d’avant-guerre. Lequel a transformé la racaille de la rue Lauriston en service de police secrète, avec fichiers tenus à jour, bureaux cloisonnés et même fiches de paye.
Ces enflures jouent les condés pour les vert-de-gris. Avec un sacré plus : les trucs de la vie clandestine, des mecs en cavale, les mensonges pour échapper à la flicaille, tout ça ils connaissent par cœur. Les agents gaullistes vont avoir du mal à les blouser, à mon sens. Le moteur de la Citroën ronronne doucement. Je baisse le carreau pour jeter mon mégot.»
La chronique jubilatoire de Dany
Oscar Wagner a disparu de JC Portes
J’avais découvert l’auteur avec son héros Victor Dauterive dans la saga révolutionnaire (dont je n’ai pas encore terminé les 5 tomes, je l’avoue). Aujourd’hui, il nous emmène dans une tout autre époque, toute aussi trouble et sanglante, une période obscure de notre histoire : l’occupation allemande et le régime de Vichy. Tout n’a pas encore été révélé sur les fortunes qui se sont faites en se jouant de l’opportunité des spoliations. Sous nos yeux, du trafic à très grande échelle, du proxénétisme de « rapport » ou de « survie » selon la place dont on en parle.
Deux narrateurs, Mo le voyou charmeur et Lizzie l’aristocrate déchue, personnages doubles et ambigus tous deux, vont tour à tour prendre la parole pour évoquer de leur place, le monde parallèle à la grande histoire. Une attirance respective peut laisser croire à ce que l’intrigue dérive vers la romance mais il n’en est rien. Ce roman d’aventure et d’ambiance va nous entrainer vers des chemins inattendus, nous révéler la petite histoire faite d’expédients sans lesquels point de survie, les agissements des occupants et de leurs complices bien autochtones.
Au-delà de l’intrigue passionnante et très documentée, de la précision apportée aux décors, qui contribuent grandement à l’ambiance lourde et noire, j’ai été bluffée par le vocabulaire et le ton employés par Jean-Christophe Portes. Bien loin du style littéraire de sa chronique révolutionnaire, il a su admirablement trouver celui des années 40, mâtiné d’argot qui donne le rythme et l’authenticité. Car oui, nous avons entre les mains un thriller d’espionnage bien noir et psychologique, aux caractères bien fouillés, contextualisés avec puissance. J’ai d’ailleurs eu l’occasion d’en discuter longuement avec lui lors de l’édition 2023 d’Auvers Noir et il ne semble pas avoir épuisé ses ressources en y trouvant un plaisir non dissimulé. Alors bravo monsieur et ravie d’avoir été étonnée, j’en redemande ! Et vous lecteurs n’hésitez pas …
Je remercie les éditions Hugo Thriller pour la chance qu’ils m’ont offerte de faire cette découverte
Lu en version numérique 9.99 €
Autre extrait :
« Ainsi, le vrai marché noir n’est pas celui évoqué de La traversée de Paris – film de 1956 de Claude Autant-Lara, d’après une nouvelle de Marcel Aymé. Il ne concerne pas quelques kilos de viande, quelques mottes de beurre vendues sous le manteau, même si tout cela était indispensable aux Français pour survivre. Le vrai marché noir, celui qui provoque misère et famine, c’est ce pillage inouï des bureaux d’achat. Un pillage industrialisé et financiarisé, qui a fait naître en quelques mois des fortunes vertigineuses, des deux côtés du Rhin. Certains industriels – pas tous – s’y sont adonnés sans retenue, livrant l’essentiel de leur production à l’Allemagne, en sous-main. De très riches familles vivent encore aujourd’hui, au XXIe siècle, dans les beaux appartements acquis avec l’argent réalisé alors. »
Je ne connais pas l’auteur mais comme j’apprécie ce genre de littérature, je note son nom ! Je vais aussi jeter un coup d’œil sur sa saga révolutionnaire pour changer un peu 😉
J’aimeJ’aime